15 févr. 2016

Blick Bassy en live


Crédit: Blick Bassy
19h00. Ménilmontant. Nous faisons la queue devant la maroquinerie. Ce soir, on va écouter Blick Bassy. L'usage voudrait le classer dans la world music; ce fourre-tout où les spécialistes rangent tout ce qui est "exotique". Blick Bassy, c'est du blues, du jazz, du Hongo, de l'assiko. C'est un mélange culturel impressionnant. Alors, on attend patiemment dans le froid que les portes s'ouvrent et que les notes de musique nous entraînent.




19h45. Assis à même le sol, on écoute le mix de Somon de Radio Nova. Un mélange savamment concocté. Ces musiques-là qu'on entend peu dans les radios mainstream. Ces talents parfois trop "world".

20h30. On s'impatiente. On tape des pieds et des mains. On siffle pour appeler l'artiste.

21h00. La salle s'assombrit. Blick Bassy nous conte une histoire en bassa. Il souffle dans un petit instrument qui nous donne l'impression d'entendre les oiseaux chanter dans la forêt. On est soudain tous debout. On est entrés dans l'univers de Blick Bassy. Un banjo, un violoncelle, un clavier, une clarinette, un X l'accompagnent sur scène.

21h15. Toute cette histoire a commencé à cause du froid. Un chauffage en panne qui a inspiré un album. La chair de poule qui recouvre nos bras n'a pourtant rien à voir avec la température. On est tellement nombreux qu'il fait chaud. On ne comprend certes pas le bassa mais on sait que c'est une belle histoire. (Des petites fiches explicatives nous ont gentiment été offertes plus tard)




21h30. On apprend que c'est le nouvel an Chinois et "Gogang", artiste musicien chinois entre avec un instrument à cordes. Le banjo, le violoncelle et cet instrument là s'accorde à merveille avec cette voix qui nous raconte une histoire venue du pays bassa au Cameroun.

21h45. Blick Bassy, presque en transe, part dans des élucubrations en bassa qui me font penser à Francis Bebey. Il conte une histoire, joue avec les intonations de voix, éclate d'un rire violent mais communicatif.

22h00. Une danseuse contemporaine vient se déhancher sur scène. On parle de vivre ensemble, du partage, d'un monde plus juste.

22h15. Chacun sourit à son voisin pour partager de l'amour au rythme de la chanson de clôture "one love". Blick Bassy verse une larme. Ému.

22h30. En attendant de pouvoir rencontrer l'artiste, je me repasse le concert en tête. Le talent de Blick Bassy est indéniable. L'amoureux de rap (très peu enclin à supporter ma soul music) a adoré. Blick Bassy manie sa langue maternelle comme personne. Il traite de sujets de société avec beauté. Il a une vision large de la culture. Un amour de la musique qui lui permet de composer et de faire des mélanges improbables. Plus que jamais, je sens l'universalité de la "bonne" musique.


22h45. Je peux enfin saluer Blick Bassy et faire ma photo. Je lui dis mon émotion de camerounaise en ce soir où la culture de chez moi est mise en valeur de la meilleure des manières. Je lui dis que je le suis depuis Macase et lui souhaite "bonne continuation". Il a chanté "Ndjé Yem" et "Nlal" que j'adore. L'interprétation de "X" était subjuguante mais il n'a pas chanté "je te ya Mo", ma préférée. Il se rappelle de mon tweet où je le demandais. J'en suis d'autant plus heureuse.

23h00. Je descends la rue de Ménilmontant -cette pente abrupte qui a failli couper mon souffle à l'aller - en sautillant et faisant de "la danse contemporaine". Je suis pleine d'une joie qui ne dit pas son nom quand je me rue sur Twitter pour tout raconter.

00h00. Je revois mes snaps de la nuit sur mon lit. Je pense cet article. Plus encore, je pense à la problématique que le chanteur a posée. Un pays avec plus de 250 ethnies. Un pays qui perd ses langues faute de pouvoir choisir une langue dominante (à part le français et l'anglais). Je ne parle ni la langue de ma mère, ni celle de mon père. Alors, je pense cet article et le suivant.

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