4 mai 2015

Autour de ton cou



Chimamamanda Ngozi Adichie est une auteure nigérianne à succès. Comme une grande partie du monde, je l'ai découverte en entendant son discours féministe en fond de la chanson Flawless de Beyonce. J'ai acheté ce recueil de nouvelles, un peu par curiosité et surtout parce qu'il coûtait moins cher que son très grand succès Americanah. Je n 'ai pas été déçue.


J'ai lu Autour de ton cou dans un contexte international particulier. Des élections au Nigéria, la mort de 149 étudiants sur un campus kényan, les attaques xénophobes en Afrique du Sud. Ma lecture a pris un autre goût. J'ai fait des parallèles (peut-être) improbables.

Quand ce professeur d'université revient sur le campus où il a travaillé pendant longtemps après la guerre du biafra, je me demande à quoi peut ressembler la vie aujourd'hui à Garissa. Quand cette chrétienne se souvient de la musulmane qui l'a aidée à se cacher lors de cette attaque où sa sœur est morte, je me rends compte que l'homme n'apprend rien. On continue de tuer au nom de la religion. La nation arc-en-ciel veut supprimer des couleurs. Des africains sont devenus étrangers chez leurs frères. J'ai peur du monde.

Les histoires s'égrainent comme les perles d'un collier autour de son cou. Cette condition d'américano-nigérianne qui parfois l'étrangle. C'est en quelque sorte une recherche d'identité. Etre une femme. Etre une épouse. S'occidentaliser. Sommes-nous mieux que les autres parce qu'on vit en Occident? Tant d'héroïnes de cette nouvelle ont participé à la fameuse loterie américaine. Il y a tous ceux-là qui, dans la réalité, montent dans des embarcations de fortune pour rejoindre le fameux occident. Ces milliers de gens qui périssent dans les mers et qui alimenteront les conversations de quelques colloques de dirigeants qui ne prennent jamais de décisions. Lorsque le directeur (européen) de l'atelier d'écrivains africains s'érige en maître de ce qui est bien ou pas, de ce qui représente l'Afrique ou pas, je vois les donneurs de leçon, je vois cette histoire que nous n'avons jamais su écrire par nous-même. On se complaît à se plaindre de la surmédiatisation d'un drame plutôt que de l'autre quand on n'arrive même pas nous-même à tenir tête et décider de s'unir, se battre, décider de ce qu'est l'Afrique.

L'auteure nous renvoie très souvent la question de la place de cette femme pour qui le rôle de l'épouse est une parure, un accomplissement. Les marieuses qui jettent des jeunes en pâture à des vieux. Des jeunes qui se jettent en pâture à des vieux pour un peu d'argent, un meilleur train de vie. A travers un couple inter-racial, elle nous montre à quel point nous pouvons voir les mêmes choses, vivre les mêmes choses mais les interpréter différemment. 

La dernière perle, c'est l'histoire de cette femme qui envoie son fils en Amérique parce qu'elle sait que la domination des autres vient des armes qu'ils utilisent. En voulant donner les mêmes armes à son fils, elle lui a appris à être un autre, un autre qui s'éloigne d'elle, de l'Afrique. "Elle en viendrait à établir un lien très clair entre éducation et dignité, entre les faits évidents et tangibles qui sont imprimés dans les livres, et ceux, doux et subtils, qui se déposent dans les âmes." Leçon de vie pour nous qui vivons dans cette société "mondialisée", entre deux cultures. Il y a toutes ces choses que l'on apprend de ceux qui se sont développés plus vite que nous, qui nous accueillent chez eux et toutes ces choses qui doivent être notre essence, notre racine, chez nous.

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